Nous ne serons jamais des héros (Salsedo, Jouvray, Salsedo)
Michaël est un jeune trentenaire qui ne fait pas grand chose de sa vie, ne sait pas trop qu’en faire, enchaînant dans les petits boulots par intérim. Sa mère est morte vingt ans avant dans un accident laissant son père aigri et infirme ; sa sœur est devenue petite bourgeoise guère sympathique. Mais quand sa grand-mère paternelle meurt, son père lui fait une propositio surprenante : l’accompagner, enfin s’occuper de l’infirme qu’il est devenu, dans un tour du monde qu’il veut faire avec l’argent récupéré de la vente de la maison de la grand-mère, en échange d’argent au retour. Sa sœur estime qu’il estime d’une idée de dingue. “Elle a raison, je dois être dingue… Mais en même temps, j’avais l’impression pénible qu’il ne se passait plus rien de surprenant dans ma vie… Alors ça ou autre chose, c’est toujours bon à prendre… Enfin… Pour dire la vérité… C’est surtout que j’avais vraiment, mais alors vraiment, besoin de thunes.” Et le voilà embarqué dans un périple à s’occuper d’un emmerdeur sacrément aigri avec lequel il n’a pas grand chose en commun sur les traces des souvenirs que ce dernier a en commun avec son épouse disparue. Le tout est ponctué de rencontre, de discussion qui l’amène à réfléchir sur sa vie plus qu’il ne l’avait fait jusque là. C’est l’histoire de la rédécouverte d’un relation père-fils qui n’avait jusque là jamais vraiment fonctionné, c’est un voyage qui a des allures parfois un peu initiatique. Et même si parfois le tout prend des airs donneurs de leçons qui se prennent un peu trop au sérieux, il en reste des remarques pas inintéressantes, même si on sent une acceptation sous-jacente et sans trop de remise en question du système en place, et un récit efficace, et même touchant par moment.
Nos grand parents, eux, n’avaient pas d’autres choix que de suivre une voie dictée par le milieu social. Ensuite ils partaient faire la guerre et ceux qui survivaient étaient des héros. Nos parents n’ont pas connu la guerre mais ils ont eu les couilles de faire la révolution, ce sont les héros de 68… —Mais ouais mais ils ont la carte gold dans le slip maintenant… —… et nous, on n’a ni guerre ni révolution à faire, pas d’adversaire à combattre, pas de parents à affronter… Si on cherche à se distinguer d’une manière ou d’autre, une marque de pompes ou un déodorant quelconque va s’empresser de récupérer tes idées vendre des merdes en masse… On sera jamais des héros, faut faire le deuil de ce vieux fantasme. On doit réussir notre passage sur terre d’une autre manière.
Frédérik SALSEDO, Olivier JOUVRAY & Greg SALSEDO : Nous ne serons jamais des héros. Bruxelles : Le Lombard, 2010 (coll. Signé). ISBN 978-2-8036-2705-9.